LE MARCHEUR ET LA QUETE D'UNITE

La marche est apparemment une activité si simple, si naturelle, qu'a priori ce ne peut être un sujet de peinture motivant. Il y a tant d'autres attitudes corporelles plus spectaculairement expressives ! Pourtant ma première visite au musée Rodin a été fortement marquée par la rencontre avec son « homme qui marche » au milieu de nombreux autres thèmes liés au corps. J'ai très rapidement essayé d'en comprendre la raison à travers une étude colorée qui a anticipé de plusieurs années l'évolution de mon parcours de peintre. Rodin avait fait entrer dans mon travail ce sujet qui ne m'a plus quitté.

J'aime marcher ; j'ai changé de lieu d'habitation pour avoir une maison atelier à ma convenance et aussi pour vivre à proximité des chemins ruraux et côtiers. Par sa verticalité, son unité subtile et discrète, ses équilibres singuliers, le marcheur semble un sujet prédisposé pour concilier la verticalité du tableau et le surgissement frontal d'une présence spatiale. La relation du marcheur à l'espace, le vide qu'il parcourt ou pénètre, leur symbiose active fragile et fugitive est en réalité tellement complexe à exprimer qu'elle désamorce toute préoccupation de stylisation redondante ou provocante .

Le marcheur est un thème qui impose l'humilité artistique, la simplicité, avec le risque permanent de flirter avec la banalité.